Quelques mois auparavant, j'avais assisté sur la scène du Volcan à la dernière d'un théâtre. Cette pièce emmenée par Vanessa Van Durme, m'avait valu l'inspiration nécessaire pour écrire.
Il y a quelques jours, je reçois un mail des relations publiques du Volcan m'informant que jeudi, vendredi et samedi soir dernier, Vanessa Van Durme rejouait au Volcan, mais dans une toute autre pièce. Ni d'une ni deux je m'organise. Les choses étant bien faites, j'avais prévu de venir sur Le Havre vendredi soir.
19h00 vendredi 12 octobre 2012 : nous arrivons avec mon ami au Volcan maritime. Assez étonnamment il n'y a encore quasiment personne. Nous nous asseyons au bar en nous accompagnant d'un verre de vin rouge.
19h30 : Nous nous dirigeons vers la billeterie et là encore, il n'y a pas foule. D'ordinaire à cette heure-ci, le hall est pris d'assaut.
19h50 : Nous rentrons en salle. C'est pour nous l'inauguration de la salle Normandy. Je suis assez étonnée et même perplexe de voir que ce soir on joue dans la petite salle, et qu'en plus elle n'est pas pleine. Mais je m'en ravie rapidement, puisque nous pouvons choisir de bonnes places !
Autour de 20h, Vanessa entre sur scène, ou plutôt dans la pièce. Pendant l'heure et demie qui a suivi, je n'ai pas eu l'impression d'être au théâtre, plutôt autour d'un café ou d'un verre avec une dame que j'avais déjà rencontré, mais que je ne connaissais que superficiellement.
Le spectacle commence et je reste intérrogée. Les débuts semblent un peu flous, on ne sait pas trop d'où l'on part, où l'on va. Elle nous parle de banalités, de lieux communs sur les genres, je suis inquiète quand à la suite de la soirée.
Mais progressivement, on en arrive à sa vie, sa naissance, son enfance, on évoluera bien vite sur ses relations, son adolescence, ses attirances, le début de sa prise de conscience, l'acceptation de sa véritable identité et finalement sa transformation, synonyme de renouveau et de dévirginisation au sens le plus large.
Son langage est quelque peu cru mais n'ôte rien en sensiblité. Elle sait tourner en dérision certains de ces épisodes et sait nous faire partager les moments prenants de son existence. Entre fou-rire, sourire, émoi et pleures, notre état tout au long du spectacle est à l'image du sien tout au long de sa vie.
La pièce est sacadée. C'est un one-woman show. A elle seule elle fait vivre cette pièce: elle joue son rôle, celui du contexte et celui des ses influences. Tour à tour c'est sa mère, son père, un inconnu... Très vite, le public se met dans sa peau, celle d'une femme tourmenté par ce qu'elle est ou n'est pas, assaillie par milles et une voix, milles et une personnes croisant son chemin.
Dans une époque peu favorable au changement de sexe et au transformisme, elle met en exergue la relation qu'elle entretien avec ses parents. Sa relation maternelle est pleine de douceur, d'altruisme et d'amour. Une mère aimante se heurtant légèrement au désarroi tantôt d'un père désirant voir en son fils un homme, tantôt à celui de voir son enfant malheureux sans même pouvoir le comprendre. C'est aussi la relation avec son père qui n'aura de cesse de contempler impuissant la mort de son fils et la naissance d'une fille, un père qui malgré toutes ces tensions finira par accepter par amour.
Elle, nous parlera de sa vie, de son mal-être en tant que garçon et de tout son chemin vers l'accomplissement : le vide sociale dans son enfance, la marginalisation subit au quotidien et la prostitution, passage forcé. La prostitution qui comme elle l'explique laisse à jamais des blessures : avoir vendu la seule chose qui lui appartienne vraiment, avoir vendu son corps, même si ce corps elle ne l'acceptais pas vraiment. Toute sa vie elle aura lutter contre et pour lui, elle ne l'aura pas compris, elle aura été dégouté, elle l'aura sali, puis elle l'aura tranformé pour qu'enfin il soit en accord avec son esprit.
Mais dans cette recherche d'harmonie c'est aussi avec ses parents qu'elle cherche à être en paix : début et fin leur sont consacrés.
Le rideau tombe, est les larmes coulent sur mes joues. Nous sortons, j'ai là gorge encore nouée.
Comme prévu, nous restons pour dîner au Mate l'eau et autour d'un délicieu repas d'inspiration belge, nous discutons de cette expérience : les rires, les émotions, la réflexion. Nous n'avions pas spécialement d'apriori sur les transexuels, seulement une incompréhension. Nous n'arrivions pas à comprendre pourquoi on peut vouloir changer son corps, en aller si loin. Pourquoi ne pas chercher à aimer son corps? Pourquoi se fixer comme ligne de vie de vouloir coute que coute devenir autre chose ? Ni l'acte ni la démarche ne sont anodins.
je ne pensais jusqu'à présent que le corps n'était accepté que si l'on savait se connaître intérieurement. Le corps avait dans l'épanouissement une moindre importance. Mais après cette soirée avec Vanessa Van Durme, je comprends mieux que le corps est l'accomplissement de l'esprit. Ce n'est que l'âme en paix que l'on peut faire de notre corps ce que bon nous semble : il est à nous !